Pour vraiment se remettre à écrire, je crois qu'il faut attendre et laisser passer les deux premiers mois d'hiver.
Une fois la période la plus sombre passée, quand les jours rallongent et que les oiseaux se remettent à chanter, alors que ce travail invisible et souterrain de l'hiver aura renforcé les racines et préparé le terreau, on commence à sentir plutôt qu'à voir les indices minuscules, énigmatiques et prometteurs du pré-printemps qui se rapproche.
La lumière et l'obscurité s'équilibrent, les graines germent, les pousses sortent, les bourgeons se gonflent.
Si vous vous êtes vous aussi laissé hiberner un peu, vous vous êtes reposé en profitant du ralentissement du temps et des activités. Vous avez un peu calmé les sombres angoisses et vous vous êtes rappelé que le renouveau viendra. Des amis vous rassurent et vous encouragent.
Et, un jour, un éclat de soleil dans les yeux ou l'une des toute premières fleurs (pâquerette, primevère ou perce-neige) réanimera un élan, une étincelle, et révèlera quelque chose de la vie intérieure qui se préparait, qui était déjà confusément à l’œuvre.
Alors, une fois rentré de promenade, vous retournez à votre table, prenez un stylo et une feuille de papier, et vous vous remettez à écrire.
Quoi ? Qu'importe. Le processus s'enclenche, le mouvement est lancé, la mécanique opère.
Un mot s'ajoute à l'autre, des lignes de mots s'additionnent pour former des phrases, un paragraphe, un texte, quelque chose ou peut-être rien.
Finalement, que la graine qui germe soit une capucine poivrée, une rose trémière à qui il faudra deux ans pour fleurir, ou une ancolie d'été un peu folle, qu'elle périclite dans son développement ou qu'une mésange l'avale - est-ce que le résultat est important ? Sans l'effort initial, sans la première lettre, sans le premier mot, on n'en saura rien.
Une lueur est apparue, un élan est né et, si vous les suivez, cela vous amènera bien quelque part, à écrire tout simplement, et qu'il en sorte quelque chose ou pas quelque fleur, ce sera quoi qu'il en soit un monde pour vous. Qu'il reste invisible et énigmatique aux yeux des autres reste anecdotique : vous vous êtes remis à écrire. Vous le sentez. C'est minuscule, mystérieux, peut-être prometteur. Continuez.
Vous écrivez.