Ce n’est que plus tard que j’ai découvert les villes respectables construites sur le cours de ce fleuve indocile et somptueux. Des villes sages, portant dignement l’histoire de France, donnent l’impression d’oublier la sauvage Loire d’avant l’histoire, ses combats et ses luttes.
Plein été dans la ville en congés. Sur les sables découverts de la Loire , il y a comme un parfum de port. Ce parfum d’ailleurs se rappelle ici et maintenant : les départs éplorés, les voyages envoûtants, les regrets dissimulés dans la ville haute alors que l’amant s’est noyé et l’anneau enfoui dans les sables.
C’est pour croire enfoui tout cela dans le fleuve que la ville s’est construit, hautaine, sur une seule berge : qu’il n’y soit pas trop évident. A chaque remords, à chaque regret, elle a monté plus haut ses tours, ses colombages ses créneaux et ses clochers. Pour oublier.
Et que vaut-il mieux faire, entre demeurer dans ces ruelles étroites d’où aucune perspective en effet ne s’ouvre vers le fleuve, ou partir loin vers l’Océan submergé d’urgences folles et insensées, aux aventures aimantées ? Pourquoi attendre un amour aléatoire dans cette ville docile, partisane et rangée d’un seul côté du fleuve ? Et pourquoi courir après ce voyageur intrépide, insatiable et parfait qui se nourrit de votre disponible immobilité ?
Je me promène, dessous la ville haute abhorrée, sur les sables retrouvés du fleuve indomptable.
Ailleurs, plus tard, je découvre, l’œil humide du vaste monde, et respire à la folie l’air du large. Je n’ai pas choisi, finalement, entre rester et partir. Je vais de l’un à l’autre, c’est le balancier de mon horloge : aller, puis venir. Attendre, puis aller. Rester, puis partir. Attendre pour partir. Rester avant de fuir.
Toujours aller de l’un à l’autre : de mon noueux amant noyé à mon lisse amour de jaspe. Rester sur une colonne d’un galbe immobile, puis courir vers la giclure éclaboussante du poisson argenté.
L’un dans l’autre, quitter encore la ville, me fondre encore un peu, m’enfoncer dans les sables, me noyer dans la Loire , m’oublier dans l’Océan.
1 commentaire:
J'aime bien ton style. De la poésie en prose. Plus digeste que des vers pour un profane pour moi. De jolis effets de style mais sans être trop prétentieux. Facile et agreable a lire tout en restant beau.
Cela donne quand même l'impression d'une certaine retenue au niveau du contenu. On reste un peu sur sa faim. On a envie que tu en dévoiles plus, que tu en dises plus au lieu de donner des brides d'info, des impressions. Si tu fais de l'introspection alors vas-y carrement: lache toi. Le tout étant de faire qqc de comprehensible par le lecteur sans être pédant et nombriliste. Ce sera sans doute mon seul et unique commentaire ! Ton frangin d'orient, au bureau un samedi apres-midi et qui se demande pourquoi !
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